25 Février 2008

Une journée dans le centre de contrôle de l’ATV

Demain, 3 avril, le ravitailleur tentera pour la première fois de s’arrimer à l’ISS. Pour cela, une équipe « melting-pot » composée d’experts CNES et ESA est déjà aux manœuvres depuis le centre de contrôle ATV-CC à Toulouse. Récit d’une journée pas comme les autres, au cœur de cette grande aventure spatiale.
2 avril 2008

Les équipes travaillent en symbiose

« Jusqu’ici, tout se passe bien », se réjouit Alberto Novelli, le « grand chef » des opérations de la mission ATV pour l’ESA. On comprend son enthousiasme : cet italien, ingénieur mécanique de formation et spécialiste de la propulsion, travaille depuis 1996 sur l’ATV, c’est-à-dire depuis le tout début de la phase de développement !

2001, Alberto Novelli, qui a commencé sa carrière chez Air Italia, avant de rejoindre l’ESA en 1990, est nommé à la direction des opérations. Son équipe est transférée, en 2003, à Toulouse, au sein du CNES, maître d’ouvrage délégué de l’ESA. « Les équipes multinationales travaillent en symbiose, c’est indispensable à la réussite de l’opération », explique Alberto Novelli. Au total, 18 experts de l’ESA supervisent le travail d’une centaine de techniciens et ingénieurs du CNES, chargés de la conduite des opérations. Et elle n’est pas des moindres !

Un « melting-pot » d’experts 24h/24

Depuis son lancement par Ariane, l’ATV est placé sous l’œil vigilant du Centre de contrôle, l’ATV-CC. Cet impressionnant complexe de 700m2 est situé au sein même du Centre spatial toulousain. Au total, une vingtaine de personnes se relaient aux consoles de l’ATV-CC, 7jours/7 et 24h/24, jusqu’au retour du véhicule dans l’atmosphère d’ici 6 mois…
Alberto Novelli et Hervé Come en discussion avec des collègues de l'ATV-CC. Crédits : ESA.
Alberto Novelli et Hervé Come en discussion avec des collègues de l'ATV-CC. Crédits : ESA.
70 postes informatiques et un écran géant au mur permettent aux experts de suivre les mouvements de l’ATV, d’entrer en contact avec les centres de contrôle de l’ISS de Houston (MCC-H) et de Moscou (MCC-M). 4 experts américains, et 4 autres russes, ont même été envoyés sur place pour suivre les manœuvres.

Car l’Europe doit rendre compte des opérations auprès des partenaires américains et russes. « C’est la première grande opération tripartite, qui mêle Europe, Etats-Unis et Russie. Cela explique la complexité d’une telle mission, sur laquelle l’Europe de l’espace fait ses preuves », rappelle Alberto Novelli, avant de conclure que tout cela est « vraiment passionnant... »

« Allo Houston, Allo Moscou, ici Toulouse ! »

Il est 14h à Toulouse, 7h du matin à Houston et 16h à Moscou. C’est l’heure de la vidéoconférence entre partenaires européen, américain et russe. Depuis les bureaux du CNES, à Toulouse, l’équipe ATV de l’ESA s’est réunit, ce mardi 27 mars, pour une réunion de plus de 2 heures, avec le Johnson Space Center de la NASA et l’Agence spatiale russe, la RKA. Le 3 avril a lieu le « rendez-vous » : l’ATV tentera de s’arrimer pour la première fois à l’ISS.
Marcial Vanhove, Directeur de vol du CNES à l'ATV-CC. Crédits : ESA
Marcial Vanhove, Directeur de vol du CNES à l'ATV-CC. Crédits : ESA
Mais avant cela, le véhicule doit faire ses preuves et montrer patte blanche auprès des partenaires. Le Jules Verne a pour cela effectué deux vols d’approche. Les experts appellent cela les « Demo Day ». Toutes les manœuvres ont été testées et validées auparavant au Centre spatial de Toulouse.

Ce 27 mars, c’est Hervé Côme, responsable de la branche des « opérations ATV », qui présente les résultats aux partenaires. Cet ingénieur français de 48 ans, diplômé de Supélec, est plutôt confiant. A raison : en fin de journée, l’équipe ATV obtient le feu vert de la NASA pour effectuer le « DemoDay 1 » (qui s’est déroulé comme prévu, le 29 mars, tout comme le « Demo Day 2 » le lendemain). L’aventure continue !
Il est 15h, Marcial Vanhove, ingénieur du CNES, spécialiste des systèmes informatiques, quitte son poste de Directeur de vol (Flight Director), après 8h d’affilées aux consoles. C’est lui qui donne le « GO » au Directeur de véhicule (Vehicle Manager), « le pilote » de l’ATV qui envoie, par satellite, les instructions de vol au cargo spatial.

Marcial Vanhove est remplacé pour la nuit par l’une des cinq homologues, Pascale Flagel, qui s’installe face aux écrans casque et micro sur la tête. « Encore une journée où il ne s’est rien passé », soupire Marcial Vanhove, en lui transmettant les informations de la journée.

La rançon du succès : hormis quelques imprévus mineurs, l’ATV se comporte comme attendu. En attendant les phases d’approche et l’arrimage à l’ISS, moments cruciaux de la mission, le Centre de contrôle est, en effet, en phase dite de « routine ». « On fait simplement du baby-sitting pour le Jules Vernes », s’amuse l’ingénieur.

« Nous activons des instruments à bord pour vérifier les fonctionnalités de l’appareil et s’assurer que tout sera prêt pour le jour J », explique Pascale Flagel.

« Vehicule Manager : turn the solar-panels ! »

« Il y a des manœuvres de routine. Par exemple, tous les deux jours, au moment de l’éclipse, il faut tourner les 4 panneaux solaires, ces grandes ailes bleues métalliques, qui alimentent l’ATV ou encore activer chaque jour des outils à bord afin que la NASA puisse calculer son orbite ».

Pascale Flagel donne alors les ordres au Directeur de véhicule, placé derrière elle. Une fois, l’opération effectuée, Pascale Flagel en rend compte à Emilio De Pasquale, le Directeur de mission, le « MD » (Mission Director), en poste ce jour-là. Cet expert de l’ESA supervise le directeur de vol du CNES. «  La nuit, nous sommes simplement d’astreinte téléphonique », détaille Emilio De Pasquale. Mais en cas d’anomalie ou d’urgence, il sera réveillé sans scrupule car c’est au directeur de mission de l’ESA que revient de prendre une décision. C’est parti pour 6 mois d’aventure intense !

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